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Echos du colloque AFRICANTI sur les "Fractures numériques en question" (du 25 au 28 août 2003 à Hourtin - France)

Brève : septembre 2003


Hourtin 2003 - colloque fractures numériques. Les comptes rendus d'Alain Ducass, Chargé du développement de la société de l'information sur les territoires, au Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (DIGITIP) et co-président de X-Afrique

L'offre d'accès et de production ? deuxième partie mardi 26 août 10H00 - 11H30

Sylvestre OUADREOGO, Université Ouagadougou : La fracture numérique est réelle et je suis convaincu que dans 40 ans, il y aura encore des villages qui n'auront pas l'Internet, mais on peut dépasser ce problème en adaptant les usages de l'Internet aux canaux traditionnels d'information africains. Par exemple chaque villageois d'un village non connecté peut ouvrir un compte en ville et l'un d'entre eux relève chaque semaine l'ensemble des messages des villageois et les apporte au village sous forme papier ou bien dans un dongle. Il suffit d'un peu d'organisation et les courriers internationaux arrivent en une semaine au lieu de trois mois. C'est ainsi que les élèves burkinabé dépassent chaque année les suisses en nombre de messages sur un forum, simplement, parce qu'il écrivent leurs message sur papier et une personne fait la saisie et l'envoi groupé de plusieurs centaines de messages.

Thomas GUIGNARD (Université de Lille) : Les accès à Internet au Sénégal : Les connexions à Internet se font actuellement par RTC (73%) ; RNIS (15%); 12% LS; 90% des fournisseurs d'accès et 63% des lignes internet du Sénégal sont situées à Dakar. En ce qui concerne les tarifs, ils vont de 1028 FCFA/heure à Dakar contre 2500 à Tambacounda et l'écart s'accroit encore avec les baisses plus importantes à Dakar qu'ailleurs. Ailleurs, 900 villages seulement sur 3000 ont accès au téléphone mobile, 15 000 abonnés pour plus de 100 000 internautes. Il y a donc près de 10 internautes par abonné, et une place importante aux espaces publics. Les points d'accès publics sont financés sur fonds privés au 2/3 et 1/3 sur fonds publics, principalement des ONG. Sur 650 sites, seulement 350 sont hébergés par des serveurs sénégalais. La majorité des points d'accès communautaires comportent seulement un à deux postes. Ils permettent un CA de l'ordre de 2 x 1800 F CFA / heure soit 750 € par mois pour une utilisation de 35 heures /semaine. Ils ne sont en général pas viables dans les villages.

Sami BEN SASSI (Doctorant Paris 1) : "Les espaces publics numériques (publinets) en Tunisie" : L'accès à l'Internet coûte 3 fois plus cher en Afrique qu'en Amérique latine et 10 fois plus qu'en Europe Il y a deux groupes d'utilisateurs : des étudiants à faibles revenus et des jeunes cadres 24% des personnes vont dans des publinets ont des ordinateurs, dont 70% d'hommes. Ils ont surtout des activités de loisirs de chat et de mels. Parmi les facteurs les plus discriminants pour l'accès à l'Internet, signalons le niveau de revenu, l'âge et le niveau d'instruction des internautes ainsi que la distance de leur habitation par rapport au publinet, et le coût d'accès.

Claire SCOPSI (Doctorante CREIS Nanterre) : "Le Téléport de Châteaurouge à Paris". Le quartier de Châteaurouge, proche de Barbès, se caractérise par la présence du marché africain très spécifique, bien adapaté aux 40 ethnies fréquentant ce quartier. Il existe un type de commerce ethnique, avec un comemrce très orienté vers les communications tels que la vente de matériels africanisés et destinés à l'export (téléphones GSM à prix imbattables, cartes téléphoniques, services de téléphonie sur IP ou d'écrivain public (ex diapora call)). Cela constitue une sorte de Téléport, non référencé dans les cadres habituels. Le commerce de proximité est détenu par des chinois ou des juifs du sentier plus que par des africains. On voit apparaître de nouveaux marchés autour des jeux en réseau et de la formation.

* Débat 734 : Communications électroniques : Quel modèle de régulation ? Mardi 26 août à 15H00

Joël VOISIN RATELLE (adjoint du chef du service international - Autorité de régulation des Télécommunications, France) rappelle que la démarche de dérégulation a démarré en Angleterre. Elle ne fournit pas un modèle, mais une expérience positive de séparation de la fonction de régulation et de la fonction d'exploitation.

Ousmane Mama TRAORE (ART Mali) : en Afrique la Banque Mondiale et le FMI ont imposé des clauses d'ajustement structurel en provoquant la régulation des télécommunications et la privatisation des opérateurs historiques. Le Mali a lancé son appel d'offres international pour une offre de service public des télécommunications. Lorsque les pays ont peu de ressources, elles ont peut-être intérêt à passer de la régulation sectorielle à la régulation multisectorielle comme l'ont choisi la Mauritanie, le Niger et le Cap Vert pour effectuer des économies d'échelle.

Mustapha MASMOUDI (Président de l'Association Tunisienne de la Communication). Nous avons créé un collectif de 34 associations pour préparer la deuxième phase du SMSI à Tunis. En l'absence de pétrole, le pays a développé les services plus rapidement que ses voisins. En matière de télécommunications, la Banque mondiale a posé des exigences de base liées au service public des télécommunications, auxquelles la Tunisie est attachée. Notre objectif est d'atteindre 10% des familles reliées au téléphone fixe.

Anne-Marie STRAUS, (Présidente - Agence Wallone des Télécommunications). Aux côtés des agences de régulation des télécommunications, (IPPT), nous nous intéressons à la diffusion des TIC dans les entreprises, par exemple, pour que notre pays le plus câblé d'Europe ne pâtisse pas de cet avantage par exemple en matière de téléphonie mobile.

Mohamed Tidiane SECK (Directeur du Service Informatique du gouvernement, Sénégal). Dans notre pays, l'agence de régulation a un double rôle de réglementation et de régulation. Les grands problèmes sont l'absence de mobilisation des acteurs sur le sujet, l'inquiétude sur la libéalisation des données et les conditions d'accès aux infrastructures internationales (SAT SAFE 3) sachant que l'on a créé une boucle optique autour du pays. De plus le pays envisage une troisième licence d'opérateurs au Sénégal.

Quels Partenariats ? : (mercredi 26 et jeudi 27)

M. Oumar TOURE de l'université de Bamako attire l'attention sur les détournements qui gênent le développement de l'Internet en Afrique. Il s'agit par exemple des usages privés de l'Internet en entreprise, qui gênent parfois les usages professionnels. Un autre problème est le manque de cohérence entre les acteurs publics dont certains sont reliés à 64 kbits/s et d'autre à 2 kbit/s. Par ailleurs, au Mali, de nombreux cybercafés ont du fermer soit par manque de compétences soit par manque d'argent. La recherche de partenaires nécessite de bien les ancrer au niveau local, de mieux gérer les ressources rares, par exemple en gérant, dans les entreprises, les droits d'accès à la messagerie, par exemple en les gérant heure par heure. Au niveau public, il faut travailler de façon plus réaliste en préparant des plans réalisables plutôt que des grands projets.

M. Ibrahima DIAGNE, chef d'entreprise à Dakar, évoque les politiques publiques mises en oeuvre pour pallier la crise de l'emploi au Sénégal au moment où l'économie nationale travaille dans des logiques de monopoles peu créatrices d'emplois et de richesses. Les premières tentatives visant à l'essaimage des professeurs dans les entreprises ont majoritairement échoué du fait de cultures inadaptées. De plus, très peu d'entreprises ont créé de la valeur grâce à l'Internet dans les années 1990 même si plusieurs projets de téléservices sont nés avec succès dans les années 2000 comme un très important call center de Dakar mais leur développement est fréiné par la frilosité des entreprises françaises ou québequoises pour sous traiter leurs téléservices au Sénégal. Pour accompagner ce mouvement, les acteurs publics ont créé à Dakar, avec l'aide du programme Canadien ACACIA, un incubateur de téléservivces qui fonctionnera 24 heures sur 24 à compter d'octobre 2003 avec des logiciels connectés à Internet, des ressources humaines et des logiciels permettant à des créateurs d'exercer leur métier. Après avoir écarté plus de 100 projets de cybercafés, l12 projets ont été sélectionnés et démarreront en octobre avec de bonnes perspectives de développement.

Président de l'ONG X-Afrique, Alain DUCASS lance un appel à partenaires pour achever la constitution d'un réseau francophone de diffusion des TIC dans les PME (projet renfort PME) et pour monter des projets d'entreprises en Afrique en partenariat avec des acteurs français (projets Marcottage)

Malik NDIAYE, conseiller TIC du Premier ministre sénégalais, est chargé de la préparation du SMSI. Localement, la société civile est interpellée pour bâtir une vision consensuelle de la société de l'information. Il attend des avancées significatives non pas tant du sommet lui-même mais plutôt de la phase de concertation préalable tripartite. Il en résulte par exemple trois importants projets : 1°) la mise en place d'un "servicepublic.sn" qui devrait être lancé début janvier 2003 avec l'aide du ministère français de la coopération ; 2°) le projet Digital freedom initiative, monté avec les américains, au profit des PME sénégalaises, avec des partenariats publics privés. 3°) la mise en place d'un intranet public, basé principalement sur les logiciels libres.

Tidiane SARR, fondateur des entreprises Netwyz (distribution de cartes prépayées) et Bytech (système de paiement électronique), a développé un système de paiement électronique adapté à la situation du Sénégal, permettant de réduire les queues mensuelles pour les paiement des factures d'eau, d'électricité et de téléphone, sachant que 5% seulement des foyers ont un compte bancaire et 1% disposent de cartes bancaires. Le porte monnaie électronique, implanté sur des cartes à puces (vendues 5000 à 8000 F CFA), a été développé en partenariat avec Gemplus et Ingenico. Il est en cours de lancement par la BST (Banque Sénégalo Tunisienne), les trois grands facturiers nationaux d'eau, d'électricité et de téléphone et par des acteurs de proximité (180 cybercafés et les stations essence) équipées de lecteurs de cartes à puces et rémunérées par un % sur les transactions. L'innovation consiste à amener les clients, non plus seulement chez les sociétés dont les guichets sont engorgés en fin de mois, mais dans des points de proximité (180 cybercafés et les stations services essence) équipées de lecteurs de cartes à puces, et de bornes de paiement de l'ensemble des factures des ménages. Ces sociétés recherchent des partenaires pour développer les technologies monétiques, et pour accélérer l'équipement des points de proximité en lecteurs de cartes, terminaux de paiement électroniques et guichets autonmatiques de banque. Contact X-Afrique + tsarr@sentoo.sn ou sarrtidiane@hotmail.com

A partir d'un projet humanitaire, Morad ADJAOUD a créé une SSII (Iris agency) à Dakar dans le domaine des logiciels libres au Sénégal. Elle réutilise les parcs informatiques obsolètes des PME grâce aux logiciels libres, par exemple en transformant en serveurs, des PC 486 sous Linux. Elle développe aussi des applications basées sur php et Mysql. Ces solutions à bas prix sont bien adaptées aux PME africaines.

Fracture numérique nord-sud : quelles solidarités ? débat jeudi 28 août 2003 9h30

Mohamed Tidiane SECK (Directeur de l'Informatique du gouvernement, Sénégal) rappelle que, face à l'essouflement de la coopération traditionnelle, le président du Sénégal a proposé une mesure phare pour pallier la fracture numérique nord-sud. Il s'agit de créer un fonds de solidarité numérique financé sur un prélèvement sur les ventes de matériels, les télécommunications internationales et un "serpent numérique", comparable au serpent monétaire, avec des indicateurs quantitatifs et des bornes basses et hautes fixées dans le cadre de consensus international. Le principe de solidarité consiste à faire une péréquation entre le suréquipement du nord et le sous équipement du sud. Ce fonds, cité dans différents documents préparatoires au SMSI, serait financé par un % sur les ventes de matériels, de logiciels et de télécomunications intrernationales et servirait à financer des projets situés à 60% en dessous du seuil, à 30% dans le serpent et à 10% au dessus avec des frais de fonctionnement limités à 8%.

Jean Paul SALON (Conseiller régional d'Aquitaine, délégué à la Coopération internationale) rappelle que l'ensemle des élus locaux est désormais confronté à l'émergence d'une nouvelle citoyenneté caractérisée par des dizaines d'associations locales impliquées dans la coopération internationale. Il en résulte une tendance irréversible de coopération décentralisée qui cherche aujourd'hui de nouveaux mécanismes d'actions. (texte de l'auteur)

Jean François SOUPIZET (Aspects internationaux de la Société de l'information, Commission Européenne) et co-auteur du livre Nord-Sud numériques (Hermès) rappelle les références de la politique européenne définie dans les décisions du sommet de Lisbonne, le projet e-europe et le nouveau cadre (paquet ) réglementaire européen. Les enjeux du SMSI concernent la gouvernance de la sociétéde l'information (tripartite :gouvernements, secteur privé, société civile) ; la recherche d'un consensus sur la mobilisation des TIC pour le développement et le déclenchement de mécanismes nouveaux de coopération numérique, soit par la création d'un fonds numérique de solidarité sur lequel l'Union Européenne est actuellement très réservée, soit par une initiative en faveur des pays les moins avancés, soit en complément par la mobilisation des acteurs privés autour de la demande solvable sachant qu'au cours des 3 dernières années, les marché s TIC du Nord ont été plus risqués que ceux du Sud. La société de l'information est désormais l'un des thèmes de la coopération économique avec des programmes européens tels que ALICE pour l'Amérique latine, EUMEDIS autour de la Méditérannée et ASIA &TIC avec les pays en développement de l'Asie. Elle devrait devenir un thème de l'aide au développement et le dialogue est engagé à ce sujet avec les pays de l'Afrique subsaharienne. Quant au SMSI, au delà de la Déclaration politique, la Commission souhaite aboutir à une meilleure synergie sur un nombre restreint de thèmes prioirtaires comme le gouvernement électronique (implication italienne forte), l'e-éducation (implication forte de l'Irlande), l'e-santé l'entrepreneuriat et le développement des stratégies et des cadres réglementaires.

Pietro SICURRO rappelle que l'INTIF est l'outil de la société de l'information de la Francophonie (55 pays et Etats membres dont 2 parmi les plus avancés et 26 parmi les moins avancés). Il rappelle que 85% des projets de partenariats sont issus du Nord alors que les projets issus du Sud seraient sans doute mieux adaptés pour développer la solidarité. Il y a actuellement un manque d'argent pour la coopération sachant que les organismes internationaux (UNESCO ONU) font appel à la francophonie pour financer leurs propres projets.

Pierre BONIS, chargé de missions "Fracture numérique" du MAE, rappelle que la coopération sur le thème du numérique est transversale par rapport à la coopération classique (agricole, scientifique, industrielle). Elle a commencé par la recherche de solutions pour améliorer les outils de communication au service de la copopération. Elle débouche sur 4 axes de coopération pour réduire la fracture numérique : 1°) le développement de l'accès notamment collectifs, 2°) la formation de formateurs TIC ; 3°) la production de contenus ; 4°) la mise en oeuvre d'un cadre juridique et réglementaire. Il en résulte des projets en cours tels que : PROCOPTIQUE sur les contenus, RESAFAQ sur l'e-formation ; ADEN sur l'appui au désenclavement numérique etc...

Didier OILLO (AUF) rappelle que le poids de l'Afrique en matière de recherche est passé de 3% à 0,1 % au cours des dernières années. Il signale que les 500 universités francophones situées dans 80 pays, ont défini une stratégie numérique autour des 4 axes : 1°) l'accès sécurisé à haut débit dans les campus numériques, 2°) la recapitalisation des compétences du Sud en luttant contre l'exode des compétences et en favorisant les partenariats, 3°) la création d'applications et de contenus locaux ; 4°) le développement des normes et indicateurs stratégiques adaptés à la solidarité.

Alain Ducass, Chargé du développement de la société de l'information sur les territoires, au ministère français de l'Economie, des Finances et de l'Industrie (DIGITIP) et co-président de X-Afrique


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